METAPHORES.
1) A l’atelier:
Dans un ensemble mécanique, les pièces qui
s’articulent entre elles disposent de la liberté voulue tout en restant
solidaires; cette disponibilité relative s’appelle le jeu. Si le jeu
est trop grand, l’ensemble bringueballe, devient anarchique, perd toute précision;
c’est souvent le résultat d’une usure. Si le jeu est trop serré,
çà coince, çà grippe, çà chauffe, tout peut casser. S’il est nul, tout
est bloqué, inefficient.
Le jeu dépend des cotes des pièces en contact. Mais
l’on sait bien qu’il est impossible, même avec les moyens les plus
sophistiqués, de réaliser un usinage respectant une dimension dans l’absolu.
C’est pourquoi, tenant compte de l’usage recherché, des efforts à
supporter, des matériaux utilisés, le bureau d’études va déterminer pour
les portions de pièces en contact une fourchette de cotes à l’intérieur de
laquelle le jeu nécessaire et suffisant sera obtenu; cet écart porte un nom
technique: la tolérance.
Ils ont de ces trucs, les mécanos!
2) Dans l’armoire à pharmacie:
Sur une boite de médicaments, on peut lire, entre
autres informations, la composition du produit dans lequel on place ses espoirs
de guérison. En tête de liste, une, deux, trois mentions incompréhensibles désignent
les « principes actifs », la précieuse molécule qui va
efficacement bondir à l’assaut du mal à travers l’univers si complexe de
notre organisme.
Et puis il y a l’« excipient » ,
QSP: 100g, ou 1 comprimé…: glucose, colorant, eau, etc..
L’excipient n’a aucune efficacité thérapeutique
en lui-même; il fait masse, offre aux principes actifs le support physique qui
permet leur dosage précis par unité, rend possibles la visibilité et la
manipulation du produit, et sa pénétration dans le corps; et puis il va se
dissoudre, libérant au bon endroit du champ de bataille la vaillante molécule.
L’excipient n’est donc pas totalement inutile….
Une équipe humaine, quel que soit le domaine, se
compose souvent comme un médicament, avec la même prétention à l’efficacité:
un minuscule quantité de principes actifs dans une masse d’excipient.
Qui est le principe actif? Qui est l’excipient?
Attention! Des illusions sont possibles..
3) Sur le chantier:
Dans le journal interne d’une grande entreprise de
travaux publics, je trouve une note concernant l’élaboration du béton de très
haute performance. On y souligne que l’une des conditions fondamentales à la
qualité du produit est qu’en son sein la colle ait la même élasticité que
les agrégats. On comprend en effet que faute de cette homogénéité, le béton
cèdera tôt ou tard s’il est soumis à de fortes sollicitations répétées :
chocs, pressions, tiraillements, vibrations, dilatations..
Ainsi, la force est dans la souplesse et dans
la cohérence réunies; ainsi, l’ouvrage tient le coup.
Sommes-nous « béton »?
JULES.
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