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VERS BETHLEEM
De très bon
matin le lendemain, je retrouvais le rabbi, le jeune Jean et Simon à la porte
des poissons. Le rabbi nous proposa de participer à un premier voyage
d’évangélisation :
- Amis, je
vous demande de venir avec moi à travers
- Pourquoi ?
- Les routes
ne sont pas faciles et tu risques d’affronter des souvenirs douloureux.
- Aucun
problème pour
- Tu vois
juste, Simon.
J’observais
immédiatement :
- Pourquoi
n’agis-tu pas ainsi avec tous ?
Ce fut le
jeune Jean qui me répondit :
- Il le fait,
Judas ! Pourquoi des reproches au Maître ? Ne te sens-tu pas différent depuis
que tu le fréquentes...
Affectueusement,
il m’avait posé une main sur le bras pour oser cette objection. Et de fait, il
avait raison. Ces quelques semaines et surtout les derniers jours avaient
complètement chamboulé ma vie.
-... Pardon,
Maître ! J’ai répondu à ta place. Mais je ne voulais pas que Judas te cause du
désagrément.
- Il ne l’a
pas fait comme disciple. Il le ferait s’il persistait dans sa manière de
penser. La seule chose qui m’attriste est de constater à quel point vous êtes
vulnérables aux déviances de Satan. Mais viendra un jour où vous serez envahis
par l’Esprit Saint. Alors, vous jugerez de tout avec justice.
Cette promesse
d’une sorte de sagesse universelle m’impressionna :
- Cet esprit
sera donné à tous ?
- Non, Judas.
Il me sembla
que cette restriction pouvait me concerner :
- Parles-tu là
pour nous ou pour tous les hommes ?
- D’abord pour
vous, et pour tous les autres ensuite. Quand ce sera l’heure, je créerai mes
ouvriers et je les enverrai à travers le monde.
- Tu le fais
déjà...
- Non, Judas.
Pour l’heure, je me sers de vous pour que vous proclamiez : « le Messie
est là... Venez à lui ». Après, je vous rendrai capables de prêcher mon
nom et d’accomplir des miracles en mon nom...
- Oh ! Des
miracles !
- Oui, des
miracles sur les âmes et sur les corps.
Cette promesse
m’éblouit littéralement. Venant de lui qui m’affirmait si souvent qu’il tenait
toujours ses promesses... Avoir pouvoir sur les forces naturelles !
Sensationnel... Je jubilais.
- Nous serons
admirés...
Le jeune Jean
ne paraissait pas aussi enthousiaste que moi :
- Nous ne
serons plus avec Jésus... J’aurais peur d’accomplir quelque chose de divin avec
mes pauvres moyens humains.
Il regardait
son Maître avec le regard triste d’un toutou battu.
Simon
intervint :
- Puis-je
livrer ma pensée, Maître ?
- Donne ton
conseil à Jean.
- Tu sais donc
que c’est un conseil...
Le rabbi
sourit sans répondre.
- Jean, il me
semble que nous ne devons rien craindre. Faisons confiance à la sagesse et à la
promesse du Maître. S’il nous envoie un jour, ce sera en sachant que nous ne
lui nuirons pas, et après avoir revêtu notre misère d’un éclat de la puissance
du Père. Cela se produira donc puisqu’il le dit. Du moins si nous ne mettons
pas d’orgueil et de désirs humains dans nos actions. Notre mission est
entièrement spirituelle, et tout autre élément stériliserait le désir du Maître
sans que ce soit impuissance de sa part.
Tout ceci
n’était pas pour Jean mais bel et bien pour moi :
- Oui, j’ai
tort. Mais désirer être admirés comme disciples du Messie au point d’avoir
mérité de faire ce qu’il fait lui-même, c’est vouloir faire resplendir la
puissante image du Christ sur le monde. Louange au Maître qui a de tels
disciples !
Le silence du
rabbi aurait du m’alerter sur l’élémentaire perversité de mon argumentaire.
Il est vrai qu’à cet instant je ne pouvais
en aucune manière
Simon
poursuivit donc, amicalement je dois le reconnaître, mon dégrossissage :
-
Judas, tu connais mon surnom. Les zélotes furent durement persécutés pour
l’image fausse qu’ils se faisaient du Messie. Nous voyions dans le Christ un
libérateur, un conquérant, un nouveau Macchabée plus grand que ton illustre
homonyme. Nous ne pensions qu’à notre patrie et à nos intérêts, pas à ceux de
Dieu. La patrie est sainte certes, mais elle n’est rien devant le ciel éternel.
Les persécutions, le bannissement, la vie d’une bête fauve en fuite et
pourchassée, la trahison de presque tous mes amis et finalement la nécessité de
survivre parmi les morts vivants atteints de la lèpre, je t’assure que tout cela
m’a donné matière à réflexion. J’avais vu la vraie physionomie du Christ avant
de le trouver en notre Maître, humble, doux et d’infinie bonté. Il est Maître
et roi de l’esprit. Il nous conduit vers le Père et pas vers un royaume de
boue. Il est aisé de le suivre, surtout pour ceux qui ont connue de grandes
souffrances. Pardonne ma hardiesse, Maître,
mais mon âme te connaissait avant notre rencontre.
-
Et c’est pour cela que je t’ai appelé. Voilà pourquoi je t’emmène pour ce
premier voyage. Tu apprendras à mieux me connaître. Et les jeunes que la vie
n’a pas encore contraints à une méditation sévère découvriront aussi qui je
suis et comment je suis arrivé à cette heure. Votre compréhension de la suite
en sera facilitée
J’étais
manifestement parmi ces jeunes. Il fallait que j’apprenne à freiner mes désirs
de parler, de me montrer à mon avantage. Ce Simon pesait effectivement très
lourd.
Très majoritairement, nous avons tous,
comme toi, le virus de
Nous étions sur la route de Bethléem.