MARIE AU TEMPLE

Des années ont passé. Nous sommes probablement en l’an -9. Marie vit au temple depuis environ neuf ans. Neuf années à recevoir chaque jour l’enseignement  des plus hautes sommités intellectuelles et religieuses du peuple juif. Car le temple est la plus haute école possible de la société juive, quelque chose qui tiendrait à la fois de notre Sorbonne, de Polytechnique et de Normale sup. La grande intelligence de Marie lui permet  d’accumuler et de mûrir en sagesse l’immense savoir qu’elle y reçoit, et cela d’autant plus facilement mais dans la plus parfaite simplicité, que ses dons surnaturels augmentent encore ses qualités naturelles. Ces dons, elle ne les remarque même pas. Elle travaille et prie sans cesse. Elle vit en  perpétuelle communion avec l’Esprit de Dieu qui l’inonde de sa tendresse.

 

Au temple, tous ont identifié en Marie une perle rare, la marque d’une très grande sainteté. Marie a fait connaître à sa maîtresse Anne de Phanuel son choix de virginité perpétuelle et Anne a évidemment informé le Grand Prêtre de cette vocation. Or la loi faisait obligation à toute femme juive de donner des enfants au peuple de Dieu. On comprend aisément l’importance de cette prescription légale chez un petit peuple qui se sait certes le peuple élu de Dieu, mais aussi en danger permanent  sous la contrainte de ses puissants voisins.  Anne de Phanuel se devait donc d’alerter Marie sur les problèmes à venir auxquels il fallait s’attendre inévitablement.

 

Le jour où elle le fit, Marie  toute jeune adolescente lui répondit :

- La loi veut que je sois épouse et mère. Notre loi vient de Dieu et j’y suis soumise. Mais j’obéis à la voix de Dieu qui me dit : « Je te veux» Anne, je suis vierge et je le resterai car Dieu le veut. Il m’aidera. Je ne crains pas. Quand viendra l’heure de mes fiançailles, je dirai mon secret à mon époux et il l’accueillera.

- Mais Marie comment pourras-tu le persuader ? Tu auras contre toi l’amour d’un homme, la loi de notre peuple et les forces de la vie...

- J’aurai Dieu avec moi. Il saura ouvrir le cœur de mon époux. Anne,  ne crois pas que je blasphème. Je pense que la loi va changer. Comme cette loi est d’origine divine, Dieu seul peut la changer et il le fera par son Messie dont le temps est tout proche. J’ai relu Daniel et j’ai compris le sens de sa prophétie. Elle ne ment pas, mais les soixante-dix semaines seront abrégées par la prière des justes car ce temps prophétique est mesuré par le cycle de la lune. Pas par celui du soleil. Ainsi l’heure est toute proche où une vierge mettra au monde un fils. Je prie Dieu de me dire où est cette maman, où est son enfant, et de bien vouloir m’accorder de devenir leur servante... leur esclave.

Anne de Phanuel se montre alors la prophétesse que nous retrouverons dans quelques années, toujours au temple, lors de la célèbre scène de la présentation de Jésus :

- Tu devrais être cette maman-là. Est-ce  pour cela que tu désires rester vierge ?

- Oh, non ! Je suis misère et poussière. Je n’ose pas lever le regard vers la gloire de Dieu. Mais servir cette maman et approcher cet enfant-Dieu... Il faut que je sois vierge. Anne pardonne à ta petite servante.

La vieille maîtresse est très émue.

 

Evidemment elle informe le Grand Prêtre de cette détermination qui n’a manifestement rien du caprice d’une petite fille. Le Grand Prêtre est très embarrassé car son devoir est de faire respecter la loi d’Israël qui est la loi de Dieu... Or il est convaincu, avec Anne, que Dieu s’exprime à travers Marie... Comment concilier l’inconciliable ?

Heureusement ce Grand Prêtre est aussi un saint homme. Il médite, il prie longuement et décide de s’en remettre à Dieu  lui-même.

 

Nous allons voir comment.