TELESCOPAGES CUBAINS (2)

 

 

 

Notre périple s’achevait par trois jours de repos dans un bel hôtel de la côte nord de l’île.

 

Avec une économie à deux monnaies dont une réservée aux touristes, nous étions dans un autre monde, totalement artificiel. Mais injurieux pour le petit peuple soigneusement tenu à distance par des accès qui lui sont rendus impossibles. Les flics et une route à péage de plusieurs kilomètres construite sur la mer constituent des obstacles infranchissables.

 

Passe pour la cuisine chichiteuse et abondante mais très éloignée de la gastronomie française. Le cadre aurait été parfait si les égoûts ne débordaient pas en permanence. La « kouika »(*) humaine dégage le même parfum sur toute la planète. Comme disait KIPLING : « Nous sommes du même sang… » En outre, l’usine d’électricité toute proche faisit presque autant de raffut que les inévitables « Chachacha » avec cours collectifs de danse.

La plage est un immense et splendide cadeau du Créateur. Mais une réflexion en langage cubain s’imposait à propos du courant froid du Labrador « Cayo Coco… No ! Caillez coquettes… Si ! » Vous aurez compris ma prudence phonétique pour ne pas faire fuir quelques lectrices un peu prudes.

 

Sur les routes de Cuba, on rencontre souvent d’énormes voitures américaines laborieusement maintenues en service à grand renfort de peinture exubérante mais aussi de soins mécaniques attentionnés.

Sur la plage ou au bord des piscines, les carrosseries récentes style Ferrari Testa Rossa sont rares. Pour leur écrasante (… c’est le mot qui convient !) majorité, tant masculine que féminine, elles connurent leur jeunesse avant la révolution locale. Les jeunes beautés autochtones ne sont affectées qu’aux services multiples de l’hôtel.

 

J’avais fréquemment observé, sur les routes de la grande île, des couples très disparates constitués de soixante-huitards bien de chez nous accompagnés de chair très fraîche mais locale. Ma visite des trésors esthétiques et pas seulement architecturaux de Trinidad renforce mes craintes pour l’avenir. Compte tenu des tristes antécédents mafieux de ce pays et des dérives constatées partout où des pays marxistes ont déboulonné leur leaders maximos, l’après Castro est hautement prévisible.

Les mafieux roumains exportent des enfants sur nos trottoirs avec la totale lucidité de leurs autorités politiques. La clientèle est chez nous seulement parce qu’il fait trop froid chez eux et qu’ils n’ont aucune infrastructure d’accueil.

A Cuba, le beau soleil est là. Le tourisme couvre plus de 50% du budget de l’état. Les infrastructures existent, la clientèle aussi. Elle est déjà là. Les mafieux sont encore cachés sous les uniformes d’une police partout présente. Je doute que la grande culture de ce peuple ait accompli le miracle de faire de tous ses agents de sécurité une congrégation d’humanistes. Les revanchards de Miami et Las Vegas ne laisseront pas passer cet Eldorado. Ils susciteront, avec l’aide de la CIA, un continuateur réaliste et compréhensif. Il sera évidemment barbu et ne délaissera le battle-dress que très progressivement. En très peu de temps, l’héritier « du Che » sera socialement et internationalement aussi crédible que notre actuel successeur du grand Charles.

 

Ils deviennent rares ceux qui furent en position de chefs de guerre. Heureusement, mais pour la guerre seulement ! Je rêve d’un Churchill aux commandes de notre belle France… Quelle baisse de standing ! Pourquoi ?

 

DANIEL-KOKA.

 

P.S. (*)

Je dois éclairer votre vocabulaire et illustrer l’origine du mot.

Sous le règne de Tonton dit aussi « le bien nommé » pour son grand art de maquiller les mythes et les rendre présentables aux gogos, notre président est en voyage officiel en terre francophone mais africaine.

Tout au long des 14.755, 32 mètres de la seule autoroute qui mène de l’aéroport au palais de l’ex-colonel devenu président local, et sur les deux terre-pleins, une foule nombreuse, sympathique et très colorée brandit une mer de drapeaux français en criant « Kouika… Kouika… ! » Tonton sent son cœur chavirer : -… Les braves gens… Enfin on m’aime… »

Le lendemain, visite obligatoire de la ferme pilote où sont élevés les steaks réservés au palais présidentiel. Tout au long de la route « … Kouika… Kouika… ! » François, de plus en plus ému se tourne vers son premier ministre, car ce voyage là ils le firent ensemble « … Béré, vous reverrez leur dotation à notre budget… »

On arrive à la ferme. L’étable est impeccable, manifestement repeinte à neuf. Mais un caniveau coupe le chemin présidentiel et déborde d’une production qui n’a rien des steaks locaux. Le colonel président prévient aimablement un accident diplomatique grave :

« Prenez garde, M. le président… Ne marchez pas dans la kouika… »

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